BIENS IMMOBILIERS – LES CLES DE L’EVALUATION


L’évaluation d’un bien immobilier est une étape cruciale dans la gestion fiscale du patrimoine, qu’il s’agisse de la valeur portée sur la déclaration d’ISF, de la valeur déclarée au moment d’une succession ou du contrôle du prix de vente dans le cadre d’une plus-value imposable.

L’administration fiscale applique systématiquement les principes fondamentaux suivants lorsqu’elle cherche à remettre en cause une valeur déclarée: Les immeubles bâtis et non bâtis sont évalués à leur valeur vénale réelle. Il s’agit du prix auquel ils auraient pu être normalement négociés s’ils avaient été vendus sur un marché libre. En fait elle utilise des techniques qui sont le reflet des règles définies par la jurisprudence.

Il est utile et opportun de connaître et d’appliquer ces règles pour anticiper une remise en cause des valeurs déclarées et préparer une argumentation pour justifier les sommes portées sur vos déclarations.
Evaluer un bien immobilier est en effet un exercice auquel doivent se plier tous les propriétaires qui souhaitent donner ce bien, qui en héritent ou qui atteignent le seuil d’imposition de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). La tâche est d’autant plus délicate qu’elle implique de se tenir informé du marché immobilier mais aussi et surtout d’apprécier avec objectivité les caractéristiques de son bien, sans minorer ni surestimer les éléments de nature à influer sur sa valeur.

Un bien immobilier est estimé en fonction de ses caractéristiques physiques et juridiques appréciées à la date d’exigibilité de l’impôt.

L’ANALYSE DU MARCHE ET LA RECHERCHE DE VALEURS DE REFERENCE.
La valeur vénale d’un bien se définit comme le prix normal auquel un vendeur serait prêt à vendre son bien et auquel un acheteur serait prêt à l’acquérir, sans que leur décision ne soit influencée par un besoin impératif (vente rapide pour le règlement d’un divorce) ou un motif exceptionnel (achat d’un appartement contigu pour s’agrandir). La seule méthode acceptée et reconnue par les tribunaux et le fisc est la méthode par comparaison, qui consiste à se référer aux prix de vente de biens similaires, vente qui doit être réalisée au moment le plus proche possible de celui où l’on procède à l’évaluation. Il est donc nécessaire de trouver des valeurs de référence pour justifier les valeurs déclarées. C’est un exercice assez difficile pour un non-professionnel. Mais c’est cette analyse que vous aurez à effectuer ou à analyser si elle vous est présentée par les services fiscaux. La clé ici est d’être capable d’apporter une appréciation critique des points de comparaison de l’administration fiscale et d’en apporter d’autres plus proches de la valeur réelle du bien.

De nombreuses autres méthodes existent (méthode par capitalisation du revenu procuré si le bien est loué, reconstitution du prix à partir du coût de reconstruction à neuf et d’un coefficient de vétusté, réévaluation à partir d’une valeur antérieure…), mais elles ne sont acceptées par le fisc que pour recouper les résultats obtenus par la méthode par comparaison. Seuls les biens exceptionnels, tels les couvents ou les châteaux, pour lesquels il n’existe pas de marché actif et homogène, justifient que l’on déroge à la méthode par comparaison. Pour ces biens atypiques, l’administration a prescrit à ses agents de faire preuve de modération dans les contrôles exercés (doctrine administrative 7 G-2311, n° 10).

Rester au contact du marché.
Être attentif aux ventes intervenues dans son immeuble ou son quartier et se tenir informé de la conjoncture immobilière est indispensable si l’on se lance seul dans l’évaluation d’un bien immobilier. Si des biens ont été vendus dans votre immeuble, le plus simple est encore d’interroger votre syndic sur les prix auxquels ils se sont vendus. Les prix des ventes aux enchères publiques et les indemnités d’expropriation donnent également quelques éléments d’appréciation. Mais ils ne reflètent pas pleinement la valeur de marché qui doit être recherchée dans les prix pratiqués dans les ventes intervenues avant la date d’exigibilité de votre impôt. Par exemple pour l’ISF du au titre de 2009, les points de comparaison doivent se rapporter à des ventes dénouées avant le 31.12.2008. Vous pouvez vous procurer les prix de vente des enchères réalisées par les notaires de Paris auprès de la chambre des notaires de Paris. Elle diffuse gratuitement une synthèse semestrielle, qui peut être consultée sur le site www.encheres-paris.com. En province, vous pouvez prendre contact avec la chambre départementale dont dépend votre bien.

Face au fisc, vous ne pouvez pas vous prévaloir des valeurs moyennes de prix au mètre carré indiquées par diverses sources professionnelles, comme les notaires ou les réseaux d’agents immobiliers. La valeur vénale ne peut être déterminée et justifiée que par des ventes, qui doivent être antérieures au 1er janvier, pour l’ISF, et à la date de décès, pour la déclaration de succession.

Trouver des références de prix de vente de biens similaires.
Pour que les références de prix soient pertinentes, il faut sélectionner des ventes de biens intrinsèquement similaires, c’est-à-dire présentant des caractéristiques communes tenant à leur implantation géographique, à la date de leur construction, leur standing, leur surface. De nombreux autres facteurs tels que l’exposition des biens, l’étage auquel ils sont situés, doivent être pris en compte. Trois à quatre références pour un bien courant suffisent pour étayer votre estimation vis-à-vis du fisc. Par ailleurs, la situation juridique de certains logements justifie une minoration de leur valeur au moyen d’une décote, d’importance variable.

L’estimation d’un bien loué est effectué en pratiquant une décote qui n’est pas fixée par le code général des impôt mais qui résulte de la pratique des expertises telle que validée par les Tribunaux. Le pourcentage de décote varie selon la nature du bail et est souvent de l’ordre de 20%.

Les biens démembrés et indivis sont délicats à évaluer. L’usufruitier doit, en principe, déclarer la valeur des biens dont la propriété est démembrée comme s’il disposait de la pleine propriété du bien. Ni l’administration fiscale (DA 7 S-351) ni les tribunaux (cass. com. du 20.10.98, n° 1675) n’admettent une diminution de cette valeur du seul fait du démembrement. En revanche, la Cour de cassation admet que la valeur d’un bien est affectée en cas d’indivision, y compris pour les biens démembrés dont la nue propriété est indivise (cass. com. du 14.12.99, n° 2043). Mais, la Cour se garde de fixer la décote applicable. Elle impose uniquement au fisc de se référer à des ventes de biens indivis. Une exigence difficile à satisfaire pour le fisc car les ventes de tels biens sont rares. Ce dernier reste d’ailleurs très réticent à admettre cette minoration. La prudence est donc de mise, d’autant que la décote peut différer selon la complexité de la situation juridique du bien, et notamment selon le nombre d’indivisaires. Dans de telles situations, ou dans les cas où vous ne parvenez pas à estimer seul la valeur de votre bien ou à vous procurer des références de ventes de biens similaires, l’intervention d’un professionnel peut vous fournir une aide précieuse.

Il peut être opportun de faire appel à un agent immobilier, un notaire, ou un expert immobilier.

La constitution d’un dossier d’évaluation ou d’expertise est souvent le préalable à une discussion constructive avec les services fiscaux. Trop souvent en effet, les contribuables se contentent de réfuter l’évaluation effectuée par l’inspecteur des impôts. Or la démarche doit être double: il est nécessaire de contester l’évaluation effectuée en critiquant les points de comparaison retenus. Puis de proposer une nouvelle évaluation avec des points de comparaison plus représentatifs et qui tiennent mieux compte des caractéristiques juridiques et physiques de votre bien.

voir aussi: Comment optimiser un investissement immobilier US