DEFISCALISATION: la responsabilité des conseils et des promoteurs


Les investissements de défiscalisation sont surveillés de près par l’administration fiscale. Ils peuvent entraîner une recherche de la responsabilité professionnelle du Conseil ou du Vendeur du produit de défiscalisation. Ce n’est le plus souvent hélas, que quelques années après la réalisation de la défiscalisation que la remise en cause de l’avantage est notifiée par le Service des Impôts. Les motifs de redressements détaillés par l’administration dans la proposition de rectification font parfois comprendre à l’investisseur que la structure du produit de défiscalisation était défaillante depuis l’origine et qu’il a été mal conseillé ou induit en erreur. Il est alors face à un double défi: contester le rappel fiscal d’une part et rechercher la responsabilité du professionnel qui lui a vendu le produit de défiscalisation d’autre part.

Au début, tout va bien et les relations entre le contribuable et le professionnel de la défiscalisation peuvent ressembler à ça:

investissement defisc

L’analyse des motifs de remise en cause du schéma de défiscalisation montre que les critiques de l’administration suivent généralement deux axes d’audit principaux. Soit les principes juridiques qui devaient être appliqués dès la souscription du produit (ou au plus tard le début de son exploitation) ne sont pas respectés, soit les modalités de fonctionnement de l’investissement mettent en lumière des anomalies dans les conditions d’exploitation.

LE NON-RESPECT DES CONDITIONS LEGALES

Il faut toujours prêter une grande attention aux conditions légales qui sont édictées pour pouvoir profiter des effets bénéfiques d’un produit de défiscalisation. Les exonérations, réductions d’impôt ou crédits d’impôt qui leur sont attachés ne sont concédés que si des conditions cumulatives sont respectées et si des formalités sont accomplies.
A ce stade, la forme prime souvent le fond et il faut veiller à ce que l’intermédiaire qui met en place le produit de défiscalisation ait une compétence et une culture juridique suffisantes pour mettre en place l’investissement en respectant toutes les conditions qui sont exigées. Il faut veiller à ce que des preuves écrites soient établies et conservées dans le dossier permanent du professionnel car ces preuves pourront être demandées plusieurs années après la réalisation de l’investissement. Les erreurs les plus fréquentes portent sur les défaillances suivantes:
  • non achèvement de la construction avant la date limite,
  • non respect des conditions de forme,
  • non respect des modalités de déclaration,
  • défaut d’engagement selon les modalités prévues par les textes,
  • défaut d’envoi en lettre recommandée avec AR d’une déclaration avant la date limite.

LE NON-RESPECT DES CONDITIONS D’EXPLOITATION

De la même façon, les modalités d’exploitation sont souvent précisément encadrées et la remise en cause de l’avantage fiscal est prévue par les textes pour les contribuables qui ne respectent pas l’intégralité de ces conditions.

Les principales causes de réintégration de l’avantage fiscal sont les suivantes:

  • non-respect de l’engagement de location,
  • conditions de loyers ou de ressources des locataires non satisfaites,
  • location à un membre du groupe familial lorsque le régime comporte des exclusions,
  • vacance trop longue entre deux locataires,
  • cession (vente, démembrement, apport, échange, donation) du logement ou des parts sociales,
  • inscription du logement ou des parts à l’actif d’une entreprise individuelle,
  • défaut d’affectation du produit de la souscription des parts de SCPI dans le délai de 18 mois.

Les conséquences, selon les différents régimes de défiscalisation sont essentiellement : la réintégration des amortissements initialement déduits ; le rejet de la réduction d’impôt ; la remise en cause de l’imputation du déficit sur le revenu global.

Toutes ces conséquences sont notifiées dans le cadre d’une procédure de rectification écrite qui nécessite de pouvoir analyser et discuter les rappels et de déceler les angles de critique des redressements notifiés.

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Naturellement si les rappels apparaissent comme étant justifiés, c’est toute l’économie de l’investissement qui est remise en cause car son taux de rentabilité va chuter dramatiquement et se transformer en un investissement de très pauvre qualité. C’est souvent l’occasion de réaliser que l’attractivité de l’investissement a été trop fortement axée sur les avantages fiscaux du produit. Cela conduit souvent le contribuable à rechercher la responsabilité du professionnel qui lui a vanté les avantages de l’investissement.

 

LA RECHERCHE DE LA RESPONSABILITE DU PROFESSIONNEL

La mise en jeu de la responsabilité professionnelle de l’intermédiaire ou du promoteur nécessite de faire le lien entre les modalités de présentation du produit qui a été faite au contribuable et les critiques formulées par l’administration lors de la mise en oeuvre de son exploitation. La proposition de rectification (n° 2120 ou 3924 selon la procédure utilisée par les services fiscaux) contient des informations clés pour comprendre le décalage entre la présentation qui a été faite et les caractéristiques du produit. Il peut arriver que l’administration fiscale ne fasse pas une application correcte des textes. Dans ce cas les perspectives d’un contentieux fiscal peuvent être opportunes en vue d’obtenir l’abandon des rappels.

Dans d’autres cas, il faut examiner si les failles de l’investissement portent sur l’un des axes suivants:

* Sur les conditions légales.
Les conditions de forme et de fond n’ont pas été totalement respectées et ces conditions sont cumulatives. Il est nécessaire de déterminer avec précision qui avait la responsabilité de la réalisation des formalités et s’il y a un lien direct entre le défaut de leur réalisation et le redressement fiscal notifié.

* Sur la mise en garde.
Aucun investissement n’est sans risque. Il est fréquent que le promoteur du produit fasse une présentation excessivement optimiste du produit et procède à des simulations sur des postulats irréalistes. La responsabilité porte alors plus sur les qualités intrinsèques du produit et sur le taux de rentabilité interne qui est – avant prise en compte de la déduction de l’avantage fiscal – excessivement basse.

* Sur le prix d’achat.
Certains contribuables ne découvrent qu’au moment de la revente du bien immobilier acquis dans le cadre d’un programme de défiscalisation, que la revente du bien 9 ans ou plus après l’acquisition génère une moins-value très importante dont le montant n’est pas en rapport avec l’évolution du marché immobilier local. Il s’agit d’une configuration classique dans laquelle le contribuable a finalement réglé une partie de ses impôts chez un promoteur qui a fixé des prix de vente incorporant l’économie d’impôt réalisée par le contribuable investisseur.

Dans toutes ces hypothèses il est nécessaire de produire un argumentaire susceptible de permettre à l’investisseur  un dédommagement en cas de contentieux. Il faut pour cela analyser les termes de la présentation du produit qui a été faite au moment de la commercialisation du projet d’investissement. Il faut également procéder à l’expertise des termes du contrat ainsi que des clauses particulières stipulées dans le dossier d’investissement.

Le professionnel a l’obligation d’informer loyalement un investisseur privé qui n’est pas spécialiste du secteur.
C’est sous cet angle qu’il convient d’analyser la documentation remise au moment de la présentation du projet d’investissement ainsi que les différents contrats et actes rédigés pour rentrer en possession du bien.

 

LA STRATEGIE DE DEFENSE DU PROMOTEUR OU DU CONSEIL

Symétriquement, le promoteur doit utiliser une méthode de conception et de production du véhicule d’investissement qui soit réaliste par rapport aux caractéristiques du marché. Il doit veiller également à communiquer loyalement et obtenir de l’investisseur la confirmation qu’il comprend les caractéristiques du produit et reconnaît être informé correctement :

Sur les conditions générales de vente ;

Sur la mise en garde quant aux risques inhérents à l’investissement ;

Sur la présentation de l’impact de la défiscalisation sur le patrimoine de l’investisseur ;

Sur le taux de rentabilité intrinsèque de l’opération ;

Sur le calcul du prix de vente par rapport à la valeur vénale de marché.