rubrique rédigée par:
Jean-Jacques Michallon
avocat fiscaliste
ancien inspecteur des impôts
www.j2m-online.fr
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La généralisation de la tenue de la comptabilité par des moyens informatiques va entraîner une banalisation des traitements informatiques dans le cadre des vérifications de comptabilité. Déjà fréquent dans le cadre des contrôles des entreprises de taille importante, le contrôle des comptabilités informatisées sera prochainement systématisé et fera partie intégrante de la vérification de comptabilité.
Les PME doivent se préparer à cette évolution qui va se traduire par un recours de plus en plus fréquent aux traitements informatiques dans le cadre des vérifications de comptabilité qu’elles subiront.
Lorsque la compatibilité est tenue au moyen de systèmes informatisées, le contribuable peut satisfaire à l’obligation de présentation des documents comptables en remettant à l’administration une copie des fichiers des écritures comptables sous forme dématérialisée(CD-Rom, clé USB…).
Le contrôle peut porter sur l’ensemble des informations données et traitements qui concourent directement ou indirectement à la formation des résultats comptables ou fiscaux et à l’élaboration des déclarations rendues obligatoires par le CGI, ainsi que sur la documentation informatique.
Lorsque la réalisation du contrôle nécessite la mise en œuvre de traitements informatiques, ces traitements sont effectués, au choix du contribuable, soit sur le matériel de l’entreprise, par les agents des impôts ou par le contribuable lui-même suivant les indications de ceux-ci, soit au moyen de copies fournies par l’entreprise sur support informatique.
Il faut distinguer dans la pratique des contrôles des comptabilités informatisées, deux terrains différents:
* Pour ce qui concerne l’obligation de mettre la comptabilité au vérificateur, l’entreprise peut choisir de présenter les registres obligatoires sous forme dématérialisée.
* Pour ce qui concerne les modalités spécifiques du contrôle et des tests que veut réaliser le vérificateur, trois modalités pratiques sont prévues et le choix revient à l’entreprise selon des modalités très encadrées.
1 – LA PRESENTATION DE LA COMPTABILITE SOUS FORME DEMATERIALISEE
L’entreprise dispose de la faculté de mettre à disposition du vérificateur ses livres comptables sous forme informatique.
Il est rappelé que les registres obligatoires qui peuvent être présentés sous forme dématérialisée sont:
– le livre journal général (il classe les écritures sous forme chronologique)
– le grand livre (il classe les écritures selon les numéros de compte du plan comptable)
– le livre d’inventaire (il contient le résultat de l’inventaire annuel, la copie du bilan et du compte de résultat).
Cette possibilité est prévue à l’article L.47A du Livre des Procédures Fiscales. L’administration peut effectuer sur les fichiers remis des tris, classements ainsi que tous calculs aux fins de s’assurer de la concordance entre la copie des enregistrements comptables et les déclarations fiscales du contribuable. Les fichiers doivent être conformes à des normes techniques pour pouvoir être lus normalement.
L’article 410-4 du PCG précise que l’organisation de la comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés implique l’accès à la documentation relative aux analyses, à la programmation et à l’exécution des traitements, en vue, notamment, de procéder aux tests nécessaires à la vérification des conditions d’enregistrement et de conservation des écritures.
La documentation doit permettre à l’auditeur de connaître et de comprendre le système d’information mis en oeuvre au cours de la période soumise au contrôle, y compris l’ensemble des évolutions significatives. Elle inclut toujours la description générale de l’ensemble du système d’information, l’inventaire et la description des matériels et logiciels utilisés, le plan d’archivage et des durées de rétention, la description des données et de leur structure.
La documentation doit décrire de façon suffisamment précise et explicite les règles de gestion des données et des fichiers mises en oeuvre dans les programmes informatiques, qui ont des incidences directes ou indirectes sur la formation des résultats comptables et fiscaux et des déclarations rendues obligatoires par le CGI.
> La conservation des pièces comptables
Il résulte des dispositions de l’article L 102 B du LPF que les délais de conservation diffèrent selon la nature des pièces visées, et selon le support utilisé lors de leur création.
Le délai général de conservation de 6 ANS, mentionné au 1er alinéa de l’article L 102 B du LPF, s’applique aux livres, registres, documents ou pièces auxquels l’administration a accès pour procéder au contrôle des déclarations et des comptabilités des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables.
Il s’applique également, pour ces documents et ceux mentionnés aux articles L 83 à L 96 du LPF, dans le cadre de l’exercice du droit de communication prévu à l’article L 81 du même Livre.
Cependant, lors qu’ils sont établis ou reçus sur support informatique, le deuxième alinéa de l’article L 102 B du LPF indique que ces documents doivent être conservés sur support informatique pendant une durée d’au moins 3 ANS, délai prévu à l’article L 169 du LPF.
A l’issue de ce délai de trois ans, et jusqu’à l’expiration du délai général de six ans, les documents sont conservés sur tout support au choix du contribuable.
2 – LA REALISATION DES TESTS ET DES CONTROLES DE LA COMPTABILITE INFORMATISEE
Lorsqu’elle envisage des traitements informatiques, l’administration doit décrire la nature des investigations souhaitées, dans un courrier remis au contribuable. Le contribuable indique son choix entre les différentes formes de traitement sur ce courrier. Le cadre juridique du contrôle des comptabilités informatisées est défini par les articles L 13, L 47 A, L 57, L 74 et L 102 B du LPF.
Avant de réaliser des tests sur la comptabilité informatisée de l’entreprise afin d’identifier des failles, des erreurs ou des oublis, l’administration doit respecter des garanties spécifiques qu’il faut examiner avec minutie:
– L’administration doit préalablement indiquer au contribuable quels sont les tests et les contrôles spécifiques qu’elle veut réaliser ;
– L’administration doit préciser la nature de ces tests et contrôles dans un courrier remis au contribuable. Ce courrier laisse le choix d’exercer son option sur les modalités de réalisation des traitements informatiques.
> La nature des traitements réalisés
Il ne s’agit pas ici d’audit informatique. Ce ne sont pas les programmes informatiques qui sont expertisés ici. Il s’agit bien de la poursuite de la vérification de comptabilité par des moyens informatiques.
Le programme source et la documentation peuvent être vérifiés par des informations des services fiscaux mais dans le cadre de la procédure spécifique de l’article L. 13 du Livre des Procédures Fiscales. Il est ici envisagé le cas bien plus fréquent (et prochainement systématique) du contrôle.
Par exemple l’administration va vérifier si l’entreprise respecte bien le traitement des recettes au taux minoré de 5,5% sur les seules recettes qui sont éligibles au taux réduit. Ou bien l’administration va entreprendre la vérification que les créances acquises sont enregistrées sur le bon exercice et va demander la communication des fichiers de commandes, les fichiers des bons de livraison et les fichiers de facturations.
Sont soumis à contrôle tous les systèmes informatisés comptables, les systèmes de gestion des recettes ou des ventes, et notamment toutes les caisses enregistreuses dotées de procédés de mémorisation et de calcul, dont les informations, données et traitements concourent directement ou indirectement à la formation des résultats comptables et à l’élaboration des déclarations obligatoires. Sont également concernés les divers systèmes informatisés relatifs au domaine de gestion ou de gestion commerciale (gestion de la production, des achats, des stocks, du personnel, par exemple), quand leurs informations, données et traitements permettent d’élaborer ou de justifier indirectement tout ou partie des écritures comptables ou des déclarations soumises à contrôle.
L’administration peut demander indistinctement, mais non limitativement, l’ensemble des éléments gérés par les systèmes informatisés de :
– comptabilité générale (livre-journal, grand-livre, balance, livre d’inventaire, etc.) ;
– comptabilité analytique ou budgétaire quand elle existe et qu’elle concourt indirectement à la constitution d’une écriture comptable ou à la justification d’un événement ou d’une situation transcrite dans les livres, registres, documents, pièces et déclarations contrôlés par l’administration (calcul des provisions, détermination de coûts de production, d’achat, de revient ou de transfert, des marges, etc.) ;
– gestion commerciale (articles, tarifs, factures, remises, clients, fournisseurs, etc.) ;
– système de caisses et de recettes ;
– gestion des stocks (quantités, valorisation, destructions, pertes, etc.) ;
– gestion de production (détermination des prix de revient industriels, etc.) ;
– gestion des immobilisations (validation des montants de dotations aux amortissements, etc.) ;
– gestion du personnel (temps de présence, rémunération, etc.).
> Les modalités de réalisation des traitements
En présence d’une comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés et lorsqu’ils envisagent des traitements informatiques, les agents de l’administration fiscale doivent indiquer par écrit au contribuable la nature des investigations souhaitées.
Le contribuable formalise par écrit son choix parmi l’une des options suivantes :
a. Les agents de l’administration peuvent effectuer la vérification sur le matériel utilisé par le contribuable ;
b. L’entreprise peut effectuer elle-même tout ou partie des traitements informatiques nécessaires à la vérification. Dans ce cas, l’administration précise par écrit au contribuable, ou à un mandataire désigné à cet effet, les travaux à réaliser ainsi que le délai accordé pour les effectuer. Les résultats des traitements sont alors remis sous forme dématérialisée répondant à des normes fixées par arrêté.
c. Le contribuable peut également demander que le contrôle ne soit pas effectué sur le matériel de l’entreprise. Il met alors à la disposition de l’administration les copies des documents, données et traitements soumis à contrôle. Ces copies sont produites sur tous supports informatiques, répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget.
L’administration restitue au contribuable avant la mise en recouvrement les copies des fichiers et n’en conserve pas de double. L’administration communique au contribuable, sous forme dématérialisée ou non au choix du contribuable, le résultat des traitements informatiques qui donnent lieu à des rehaussements au plus tard lors de l’envoi de la proposition de rectification.
Le contribuable est informé des noms et adresses administratives des agents par qui ou sous le contrôle desquels les opérations sont réalisées.
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Cette évolution du paysage réglementaire et des pratiques du contrôle fiscal en cas de comptabilité informatisée nécessite une prise de conscience des chefs d’entreprises et des changements d’habitudes.
Avant l’engagement d’un contrôle fiscal, il est nécessaire de former une équipe de travail pluridisciplinaire et de veiller à la définition précise des procédures comptables ainsi qu’à la mise à jour de la documentation informatique comptable.
Pendant le déroulement d’un contrôle fiscal, il faut veiller au respect des garanties de procédure et exercer les choix offerts par le Livre des Procédures Fiscales de façon la plus optimale conformément à la stratégie de conduite des opérations de vérification de comptabilité.